Roland Dauxois, Soleils des Archives suivi de Éloge des ombres, Cosmogone, 2019.

Roland Dauxois, Soleils des Archives, suivi de Éloge des ombres, Cosmogone, 2019.

Quelle belle idée poétique que de dresser les archives de l’émotion et des vibrations du corps et de l’esprit! Chaque fiche, chaque archive est une note neuve qui contribue à la connaissance de ce qui se dérobe.

Ce sont comme les traces d’un dialogue entre soi dans la cage intérieure (j’allais écrire thoracique), que ces questions, ces interpellations, ces pensées, ces regrets, ces dépits, ces illuminations.

La poésie de Roland Dauxois jaillit d’entre les rues, les éblouissements, les ombres, les mouvements, les craintes et les accomplissements, elle emprunte sa langue à la terre, à la nuit, à la douleur et à la chair, à la mort et à la furieuse envie de vivre.

Soleils des Archives est une façon puissante de magnifier la mémoire, surtout celle que l’inconscient a enfoui très profondément au centre même des entrailles, comme un cœur secondaire qui tient la main du peintre et du poète.

Archive emblématique, la 41 : Et tous ces fruits tombés ?/Prenez-les, ils n’appartiennent à personne,/prenez-les avec leurs pulpes, leurs écorces, leurs senteurs./Ces fruits sans patience sondent déjà/les désirs de vos lèvres,/ouvrent des ciels infinis en vos yeux.

Parfois des accents prophétiques, dont heureusement Roland Dauxois n’abuse pas dans ce livre : (archive 100) …quand nous aurons tout oublié/ il nous suffira de tout recommencer,/là où les archives du fleuve/se réconcilient avec celles de la mer.

Et dans l’Éloge des ombres : (75) …De quel effondrement écrivons-nous,/de quel horizon à la sourde vibration/écho d’un monstre double à l’éclatante diction. …

Et heureusement au fond des ombres il y a la lumière : (79) Le poème est une lampe/il nous faut la saisir,/la poser loin devant nos têtes/ afin qu’elle écarte les ombres,/éclaire nos cheminements futurs.

Je lis la poésie de Roland depuis des années, et en même temps je regarde sa peinture. L’une trace un chemin qu’on ne retrouve pas toujours strictement dans l’autre, mais ce qu’il y a de sûr, c’est l’homogénéité de ces deux moyens artistiques chez lui, dont on pourrait dégager quelques traits indubitables : puissance, profondeur, inquiétude, espoir, recherche de la lumière dans l’obscur, patience attentive, fugitive émergence de la couleur, et ça ou là rebellions vite tenues, mais toujours volonté farouche Je marcherai et me relèverai parmi les hommes,…

 

Georges Chich

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