Né à Lyon en 1993, Guillaume Dreidemie est poète et professeur de philosophie, directeur adjoint de l’établissement ICOF – Campus Saint Irénée, à Lyon 5e. Conférencier à l’Université Pour Tous, au Collège International de Philosophie et au Musée des Beaux-Arts de Lyon. Il collabore régulièrement avec la revue Matières à penser. Membre fondateur de la revue de poésie L’Écharde.
Son recueil de poésies, Le Matin des Pierres, est paru au printemps 2023 aux éditions La Rumeur libre. Parmi les thématiques qui lui sont chères et qui traversent ce recueil, on peut retenir : l’éternel retour, le murmure, les vertèbres, et tout ce qui de près ou de loin chantonne et entête, comme un refrain.
Deux ouvrages à paraître fin 2023 :
– Ardeurs de l’idéalisme, éditions Cosmogne.
– Penser le monde après Kant, éditions Kimé.
Vertèbres
votre père
dont le regard bleu seul vous importe
dans ce putride dimanche
veille à longueur de jour.
*
que dites-vous
sans fin ni attendu
dans vos dernières secousses
que dites-vous ?
*
nous allons jouir d’une pure présence
comme un fromage d’Auvergne
abandonné sur la table
abandonné et frais ruisselant
*
nous luttons contre le silence
imbéciles que nous sommes
avec les moyens du bord de la rive et du ruisseau
trempés par les remous
nous sommes des noyés accomplis
nous avons toute la grâce du chien trempé
nous avons même l’odeur
*
dans la rue les gens nous confondent avec les chiens
pourtant nous avons de très beaux manteaux
*
on ramasse des vertèbres dans la forêt
et il se trouve qu’on rêve
c’est un chat mort c’est le chat
qui roulait aux pieds de Baudelaire
Charles notre ami
c’est grâce à lui que nous nous rencontrons
ce sont les restes de son repas peut-être
*
pourquoi ramasser dans la forêt les restes d’un chat
si ce n’est pour convaincre que nous avons toutes
nos vertèbres
*
je surprenais un ami
qui comptait silencieux
les pièces de son jeu
il n’en manquait pas
tous les os étaient là
*
j’entends l’ami compter
lentement ses vertèbres
il s’assure que son dos est solide
encore vivant
*
à la plus intime mais nécessaire révolte
crever ce qui nous ronge d’un coup de dent
sec?
*
ou recueillir plus
silencieusement
une à une
ces branches qui pourraient fleurir comme
la Reine porte
en sa bouche
ce qu’elle doit sauver de notre apocalypse